Angiodermite nécrotique : symptômes, diagnostic, traitement et prise en charge

Angiodermite nécrotique : symptômes, diagnostic, traitement et prise en charge

L’angiodermite nécrotique est un type d’ulcère ischémique particulièrement douloureux du membre inférieur, souvent confondu avec d’autres plaies chroniques de jambe. Cette pathologie, encore trop souvent méconnue, nécessite une prise en charge spécifique et rapide.
Découvrez comment l’identifier, la différencier et la traiter efficacement en pratique clinique, la greffe restant le traitement le plus efficace.

Définition et physiopathologie de l’angiodermite nécrotique

L’angiodermite nécrotique (aussi appelée “ulcère de Martorell” ou “ulcère suspendu”) est une plaie cutanée ischémique liée à une microangiopathie artériolaire des membres inférieurs. Elle est due à une occlusion des petites artères du derme, dans un contexte d’hypertension artérielle ancienne, parfois de diabète ou d’insuffisance veineuse chronique.

L’origine précise de cette maladie reste mal connue : on suspecte un rôle central des atteintes vasculaires (microangiopathie hypertensive), mais d’autres facteurs sont probablement impliqués.

Épidémiologie de l’angiodermite nécrotique

Bien que l’angiodermite nécrotique soit souvent présentée comme une maladie rare, elle peut représenter jusqu’à 10 à 15 % des ulcères de jambe dans certaines études.
Elle atteint en priorité les femmes de plus de 65 ans, mais peut aussi toucher les hommes. Le terrain vasculaire est constant : hypertension artérielle ancienne, diabète, parfois insuffisance veineuse. La bilatéralité et la symétrie sont possibles : une même lésion peut se développer sur les deux jambes.
Il n’y a jamais d’angiodermite nécrotique au-dessus du genou ou au niveau du pied.

Symptômes et diagnostic clinique

Le diagnostic est avant tout clinique. La lésion démarre généralement après un traumatisme minime à la jambe. Elle débute par une rougeur, évolue vers un aspect violacé, puis une nécrose cutanée avec formation rapide d’une ulcération extrêmement douloureuse.

La douleur est d’emblée intense et permanente, même la nuit, sans position de soulagement. L’ulcération s’étend de façon centrifuge, à partir d’une bordure rouge et violacée (livédo). L’évolution peut être aggravée par le frottement ou une détersion agressive, traduisant un phénomène de pathergie.

À l’examen, la plaie est nécrosée, à bords nets, peu exsudative, souvent localisée sur la partie antéro-externe du tibia, parfois de manière bilatérale et symétrique. Elle peut aussi se situer en regard de la zone achilléenne (exemple : suite à un frottement sur le talon d’une chaussure). La périphérie violacée (« livédoïde ») est caractéristique.

Un bilan doppler artériel des membres inférieurs est indispensable : il permet d’exclure une artérite sévère.

Diagnostic différentiel

Le diagnostic différentiel inclut :

  • Ulcère artériel : terrain d’artériopathie, localisation plutôt au pied ou aux orteils, absence de microangiopathie
  • Pyoderma gangrenosum : ulcère très inflammatoire, bords violacés, contexte de maladie systémique
  • Ulcères veineux : bords irréguliers, exsudat abondant, douleur moins intense
  • Nécrose cutanée d’autres origines : calciphylaxie en cas d’insuffisance rénale chronique sévère

Le patient peut parfois avoir une insuffisance veineuse associée ou une artériopathie oblitérante des membres inférieures mais celle-ci ne doit pas être suffisamment sévère pour expliquer la présence de l’angiodermite nécrotique.

 

Tableau comparatif des diagnostics différentiels
Diagnostic Localisation Douleur Terrain Aspect de la plaie
Angiodermite nécrotique Tibia antéro-externe mais jamais au dessus du genou et au niveau du pied Intense, permanente Femme >65 ans, HTA, diabète Nécrose noire, bords nets, extension centrifuge, livedo périphérique
Ulcère artériel Pied, orteils, suspendu Intense Artériopathie Nécrose sèche, creusante
Pyoderma gangrenosum Jambe, périostéal Variable Maladie systémique Bords violacés, très inflammatoire
Ulcère veineux plutôt malléolaire Modérée Insuffisance veineuse Bords irréguliers, exsudat
Calciphylaxie cutanée Jambe, cuisse Très douloureux IRC sévère Nécrose, calcifications sous-cutanées

Causes et facteurs de risque

L’angiodermite nécrotique est surtout liée à une microangiopathie hypertensive, secondaire à une HTA ancienne. Les facteurs de risque : hypertension artérielle, diabète, âge avancé, insuffisance veineuse, obésité.

Des facteurs favorisants : traumatisme même minime, friction, parfois gestes de soins inadaptés (détersion agressive).
Attention à la calciphylaxie cutanée chez les patients en insuffisance rénale chronique sévère : le diagnostic différentiel est parfois difficile.

Prise en charge médicale et infirmière

Le traitement associe :

  • Repos +++ et traitement efficace de la douleur (antalgiques palier II/III) en premier lieu
  • Hospitalisation souvent nécessaire (lésion étendue ou douleur incontrôlable)
  • Greffe précoce +++ : traitement principal, permettant un soulagement rapide de la douleur et un arrêt de la poussée
  • Soins locaux : pansements doux, éviter toute friction ou détersion agressive (phénomène de pathergie).
  • La douche n’est pas contre-indiquée, à condition de respecter un faible débit
  • Compression non recommandée
  • Contrôle strict de la tension artérielle et correction des facteurs de risque cardiovasculaires
  • Traitements complémentaires possibles : corticoïdes topiques forts, thérapie par pression négative, PRP en gel, matrices dermiques, anticoagulants (en cours d’évaluation), électrothérapie (prometteuse)
  • Prévention des complications : surinfection : prélèvement bactériologique, antibiothérapie adaptée si besoin
  • Prise en charge pluridisciplinaire (médecin, infirmier expert en plaies, dermatologue, chirurgien plasticien)

La stratégie thérapeutique dépend de l’ancienneté de la plaie et de la réponse au traitement. Des traitements spécialisés peuvent être nécessaires pour obtenir la cicatrisation complète. Suivez ma formation pour établir une stratégie adaptée.

 

Complications possibles et évolution de l’angiodermite nécrotique

Comme toute plaie chronique, l’angiodermite nécrotique expose à plusieurs complications :

  • Surinfection bactérienne : le risque de surinfection locale est élevé, surtout chez les patients fragiles. Un prélèvement bactériologique est indiqué devant tout signe clinique d’infection.
  • Douleur chronique invalidante : la douleur peut persister longtemps et altérer la qualité de vie, nécessitant parfois une prise en charge antidouleur spécialisée.
  • Retard de cicatrisation : certaines lésions évoluent lentement malgré une prise en charge optimale, notamment en cas de terrain défavorable (diabète, âge avancé).
  • Extension ou récidive : l’ulcère peut s’étendre de façon centrifuge, ou réapparaître sur l’autre jambe (atteinte bilatérale possible).
  • Exposition tendineuse ou osseuse possible selon les localisations
  • Risque d’amputation : exceptionnel mais possible en cas d’évolution défavorable, d’infection profonde ou de perte de substance importante.

Par ailleurs, il n’existe pas de risque dégénératif connu (transformation maligne) associé à l’angiodermite nécrotique.

Durée de cicatrisation

La durée de cicatrisation d’une angiodermite nécrotique est variable : elle dépend du terrain, de la précocité du diagnostic, et de la rapidité de mise en place d’une greffe cutanée. Avec une prise en charge adaptée, la greffe permet souvent une cicatrisation en quelques semaines. Sans greffe, l’évolution est généralement lente : plusieurs mois sont parfois nécessaires pour obtenir la fermeture complète de la plaie. Un suivi spécialisé est recommandé jusqu’à cicatrisation complète pour prévenir la récidive.

Cas cliniques et photos

angiodermite nécrotique photo
angiodermite nécrotique photo
plaie nécrosée photo

FAQ – Questions fréquentes sur l’angiodermite nécrotique

Comment soigner une angiodermite nécrotique ?

Le traitement principal repose sur le contrôle de la tension artérielle, la gestion de la douleur, les soins locaux doux, la prévention de la surinfection, et la greffe précoce qui permet un soulagement rapide. Une hospitalisation et une prise en charge pluridisciplinaire sont souvent nécessaires.

Quels sont les symptômes de l’angiodermite nécrotique ?

Douleur très intense, continue (jour et nuit), ulcère nécrosé à bords nets, extension centrifuge à partir d’une zone rouge/violacée, parfois bilatéral, localisé sur la jambe mais jamais au-dessus du genou ni au niveau du pied.

Comment différencier une angiodermite nécrotique d’un ulcère artériel ?

Ces deux types d’ulcère pouvant être d’allure semblable, seule l’absence de pouls périphériques et surtout le doppler artériel montrant une artériopathie oblitérante des membres inférieurs va orienter vers un ulcère d’origine artériel.

Quelle prise en charge infirmière pour l’angiodermite nécrotique ?

Évaluation régulière, soins locaux très doux sans frotter, éviter les pansements traumatisants et la friction, surveillance de l’évolution, prise en charge de la douleur, prévention des complications.

Existe-t-il des photos ou des cas cliniques d’angiodermite nécrotique ?

Oui, de nombreux cas cliniques sont documentés : ulcère nécrosé noir, bords nets, extension centrifuge, localisation typique. Les photos cliniques sont utiles pour reconnaître cette entité.

Quelle est la cause de l’angiodermite nécrotique ?

Le plus souvent, une microangiopathie hypertensive sur terrain vasculaire (HTA ancienne, diabète), parfois favorisée par un traumatisme minime.

Combien de temps faut-il pour cicatriser une angiodermite nécrotique ?

La cicatrisation dépend de la rapidité du diagnostic, du terrain et de la stratégie thérapeutique. Une greffe précoce permet souvent une cicatrisation en quelques semaines, alors qu’une prise en charge conventionnelle peut nécessiter plusieurs mois.

Tout savoir pour prendre en charge l'angiodermite nécrotique

Suivez notre formation approfondie avec photos, protocoles de soins et de traitement.

Ulcère sur nécrobiose lipoïdique : reconnaître et traiter une plaie diabétique atypique

L’ulcère du patient diabétique ne se résume pas aux causes veineuses ou artérielles.

La nécrobiose lipoïdique, dermatose rare mais sous-estimée, peut entraîner des ulcères à fort potentiel de chronicisation. Cet article vous aide à en identifier les signes, à adapter vos soins et à éviter des erreurs fréquentes.

Qu’est-ce que la nécrobiose lipoïdique ?

Une dermatose inflammatoire chronique

Elle touche le derme et l’hypoderme et se caractérise par des dépôts lipidiques et une inflammation granulomateuse. La physiopathologie reste mal élucidée.

Liens avec le diabète

Jusqu’à 90 % des patients atteints sont diabétiques. L’incidence reste faible (0,3 à 2 %), mais le diagnostic est essentiel pour éviter les ulcérations.

Comment reconnaître une plaque de nécrobiose ?

  • Forme : plaque ovalaire, bordure rouge surélevée, centre jaunâtre et atrophique

  • Localisation : faces antéro-internes des jambes

  • Évolution possible : ulcération, surtout après un choc mineur

Précautions spécifiques en cas d’ulcère

Détersion et nettoyage

➡️ Soins très doux sans frotter
➡️ Éviter curettage, compresses adhérentes ou pansements traumatiques

Choix du pansement

  • Interfaces silicone ou hydrofibres

  • Pas d’adhésif collé à la peau lésée

  • Compression légère si artères perméables (IPS ≥ 0,8)

Application de dermocorticoïdes

➡️ Appliquer uniquement sur la bordure rouge inflammatoire, jamais sur le centre atrophique

Coordination interprofessionnelle essentielle

  • Infirmière : éducation, surveillance, soins atraumatiques

  • Dermatologue : confirmation diagnostique (biopsie) et orientation thérapeutique

  • Médecin traitant : prise en charge globale du diabète et des comorbidités

Conclusion

Reconnaître une nécrobiose lipoïdique permet d’éviter un traitement inadapté et de prévenir la chronicisation de plaies atypiques. La coordination des soins et la connaissance des gestes justes font toute la différence.

Kératoacanthome : lésion cutanée de croissance rapide et prise en charge

Kératoacanthome : lésion cutanée de croissance rapide et prise en charge

Qu’est-ce qu’un kérato-acanthome ?

une lésion de croissance rapide

il s’agit d’une tumeur épithéliale qui se développerait à partir du follicule pilo sébacé

Au début il peut être confondu avec une hyperkératose une verrue ou des molluscums contagiosum, des nodules de prurigo.
il peut survenir à la suite d’une plaie ou d’un traumatisme
il est de survenue brutale avec une croissance très rapide.

Présentation clinique

en général cela commence par une papule érythémateuse qui passe inaperçue puis en quelques jours se forme une tumeur nodulaire violacée symétrique bien limité comme posé sur la peau
Il forme un bourrelet périphérique revêtu d’un épithélium lisse et avec un cratère central rempli de matériel corné

il régresse spontanément en deux à 12 semaines par un affaissement du bourrelet et l’élimination du cratère central. il laisse une cicatrice souvent atrophique et inesthétique
il peut ensuite évoluer vers une ulcération extensive.

Variantes cliniques

la forme la plus fréquente et la forme dite unique ou solitaire qui prédomine au niveau de la partie distale des membres et le visage avec un diamètre inférieur à 3 cm. la régression de cette lésion se fait habituellement entre deux à trois mois

la forme extensive et ulcéreuse est plus rare et très active elle est plutôt décrite au niveau des lèvres des nez et des paupières

il peut y avoir aussi des formes géantes suite à la confluence de plusieurs kérato-acanthome et qui siège sur les avant-bras

il existe enfin des kérato-acanthomes multiples d’origine génétique et familiale ou suite à un déficit de l’immunité cellulaire.

keratoacanthome photo
keratoacanthome coude photo

Diagnostic différentiel et confirmation

le kérato-acanthome est considéré aujourd’hui comme une forme de particulière de carcinome épidermoïde avec un risque métastatique très faible par rapport à au carcinome épidermoïde invasif (< 1 %).

l’aspect clinique est très évocateur mais nécessite des biopsies pour confirmer le diagnostic.

Les diagnostics différentiels sont : carcinome épidermoïde invasif (SCC), carcinome basocellulaire nodulaire/ulcéré, pyogranulome, mélanome amélanotique, molluscum géant chez l’immunodéprimé, pseudo-lymphome cutané.

Facteurs de risque

l’étiologie est mal connue elle semble liées à plusieurs facteurs souvent intriqués :
facteurs génétiques, facteurs infectieux, en particulier certains virus comme le PVH, l’immunodépression (hémopathie maligne ou traitement immunosuppresseurs), facteur environnementaux comme l’exposition solaire ainsi que les causes traumatiques , le contact avec les carcinogènes chimiques comme le goudron

Comment se soigne un kérato-acanthome ?

En théorie l’évolution spontanée du kérato-acanthome devrait conduire à une abstention thérapeutique et une surveillance mais en pratique le caractère rapidement évolutif est souvent inquiétant pour le patient ainsi que la crainte de transforme d’évolution en carcinome épidermoïde invasif

le traitement repose avant tout sur une exérèse chirurgicale précoce notamment la chirurgie de Mohs

Si le patient est opposé à la chirurgie ou si la chirurgie est potentiellement mutilante ou dans le cas de kérato-acanthome de grande taille on peut discuter des injections intra-lésionnelles de chimiothérapie locale.

dans les cas de lésion multiple l’exérèse chirurgicale peut être couplée à un traitement par rétinoïde par voie orale

Traitement d’exception : chimiothérapie par voie générale ou locale, thérapie ciblée et radiothérapie

Dans tous les cas : pas de traitement sans examen anatomopathologique.

Le risque de récidive est faible (< 2 %)

Prévention et suivi

La prévention repose sur la protection solaire écran total, une surveillance cutanée annuelle chez le transplantés/ID.
Informer sur la rapidité de croissance → consultation précoce.

En résumé en cas de suspicion adresser pour auprès du spécialiste pour biopsies.
En attendant poursuite des soins locaux avec les pansements habituels en fonction du degré d’humidité s’il y a un écoulement ou une ulcération.
En cas de « lésion sèche » pas de pansement particulier.

les méthodes de détersion curetage électrocutoagulation vaporisation laser, cryochirurgie etc sont à éviter car la destruction est souvent incomplète et favorise les récidives et elle ne permet pas une étude anatomopathologique.

Cas clinique

Un cas clinique
patiente de 84 ans immunodéprimée suite à des traitements immunosuppresseurs pour rhumatisme psoriasique.
Elle a présenté une plaie de jambe gauche suite à un choc qui est rapidement devenu nodulaire.
Sachant qu’elle était sous anticoagulant oraux, le médecin traitant a pensé qu’il s’agissait d’un hématome en constitution.
mais avec le temps la lésion a continué à grossir avec une légère dépression croûteuse en son centre.
Des biopsies sont décidées. Une anesthésie locale à la XYLOCAINE adrénalinée est préparée. Au moment de l’infiltration sous-cutanée de la lésion au produit anesthésiant, la lésion s’est brutalement ouverte en chou-fleur, témoignant du caractère friable du bouchon kératinique. La lésion semble avoir été retirée en totalité.

l’examen anatomo-pathologique a confirmé le kérato-acanthome et la plaie est en bonne voie de cicatrisation. Mais il n’est pas certain que la totalité ait été enlevée. Une chirurgie a été proposée mais la patiente est pour l’instant réticente. Le dermatologue a donc décidé de la revoir pour une surveillance régulière.

keratoacanthome photo jambe
keratoacanthome photo jambe après infiltration
keratoacanthome photo jambe après biopsie : plaie en voie de cicatrisation

Questions fréquentes sur le kérato-acanthome

Comment différencier le kérato-acanthome du carcinome épidermoïde ?

l’aspect clinique est très évocateur mais nécessite des biopsies pour confirmer le diagnostic.
Les diagnostics différentiels sont : carcinome épidermoïde invasif (SCC), carcinome basocellulaire…

Quel est le facteur de risque du kérato-acanthome ?

l’étiologie est mal connue ; facteurs génétiques, PVH, immunodépression, exposition solaire, traumatismes, goudron…

Comment se soigne un kérato-acanthome ? / Quel est le meilleur traitement ?

le traitement repose avant tout sur une exérèse chirurgicale précoce notamment la chirurgie de Mohs.
Injections intra-lésionnelles ou rétinoïdes oraux peuvent être discutés selon les cas.

Le kérato-acanthome est-il douloureux ?

La lésion est habituellement indolore, mais une ulcération extensive peut devenir sensible.

Le kérato-acanthome peut-il guérir tout seul ?

il régresse spontanément en deux à 12 semaines mais peut laisser une cicatrice et la crainte d’un SCC justifie souvent l’exérèse.

Cannabis et artériopathie oblitérante des membres inférieurs : plaie nécrotique du sujet jeune

Cannabis et plaie des membres inférieurs : un danger sous-estimé

Le cannabis est souvent perçu comme inoffensif, pourtant il peut provoquer une artérite oblitérante des membres inférieures distale grave, notamment chez le sujet jeune. Ce cas clinique d’ischémie digitale souligne les dangers d’une consommation chronique associée à une plaie infectée.

Cas clinique

  • Contexte
    Homme de 45 ans, plaie ulcérée du 3ᵉ orteil post-ablation de botriomycome.
  • Signes cliniques
    Ulcération pulpaire avec exposition osseuse ; 2ᵉ orteil douloureux. Pression systolique à 32 mmHg = ischémie critique chronique. (Ischémie digitale).

Facteurs de risque et diagnostic

  • Fumeur (10 cig/j) et cannabis quotidien depuis 25 ans.
  • Artériographie : désert vasculaire sans arcade plantaire.
  • Diagnostic : artérite aiguë/chirurgicale, imputable au cannabis.

Prise en charge

  • Résection de l’orteil infecté.
  • Tentative de revascularisation échouée.
  • Vasodilatation par Ilomedine : cicatrisation en 2 mois.
  • Arrêt complet du tabac et cannabis.
  • Chaussage ultra‑souple et mobilisation pour favoriser la circulation collatérale.

Prévention & suivi

  1. Soins locaux + décharge.
  2. Réinterroger régulièrement sur consommation de cannabis.
  3. Revascularisation si possible, sinon vasodilatation.
  4. Encourager la marche et choisir un chaussage adapté.
  5. Protéger les extrémités ; consulter dès la première plaie sous-genou.

Conclusion : mise en garde sur les risques potentiels liés à la consommation de cannabis

Le cannabis n’est pas neutre pour la cicatrisation. Il peut induire une artérite sévère, une ischémie critique, voire une amputation.

👉 En cas de plaie nécrotique chez un sujet jeune, pensez systématiquement à interroger la consommation de cannabis et tabac.

3 raisons de biopsier une plaie dès aujourd’hui

La biopsie cutanée de plaie est un geste technique médical courant, mais parfois sous-utilisé. Elle peut pourtant changer totalement la stratégie thérapeutique en cas de plaie chronique, atypique ou suspecte.

Pourquoi biopsier une plaie ?

Dans certains cas, seul l’examen histologique permet :

  • D’identifier une cause tumorale (carcinome épidermoïde)

  • De détecter une infection profonde avec précision

  • D’éliminer des causes rares (vascularite, pyoderma gangrenosum, infections atypiques, etc…)

Quels signes doivent alerter ?

  • Absence de cicatrisation après 6 semaines malgré soins adaptés

  • Douleur inexpliquée

  • Bourgeon charnu ou infiltré

  • Nécrose sans cause vasculaire

  • Plaie sur terrain immunodéprimé ou cancéreux

  • Localisation atypique (au-dessus du genou…)

  • Plaie trainante depuis plus de 6 mois

Comment réaliser une biopsie de plaie ?

Matériel :

  • Punch ≥4 mm (souvent 2 à 3 prélèvements)

  • Bistouri si nécessaire

Anesthésie :

  • Lidocaïne seule ou associée à l’adrénaline (sauf extrémités : doigts, orteils, nez, verge)

Prélèvement :

  • Toujours après désinfection rigoureuse

  • En périphérie de la plaie

  • Zone active si doute clinique

Trois grands cas cliniques

1. Suspicion tumorale

Biopsie des berges et zones hypertrophiques. Fixation au formol, envoi en anatomopathologie.

2. Suspicion infectieuse

Biopsie profonde après détersion. Rinçage au sérum physiologique. Envoi en bactériologie dans un flacon stérile (sans formol).

3. Ulcère atypique ou rare

Recherche de vascularite, pyoderma, calciphylaxie, infection par mycobactéries ou parasites. Biopsie de la bordure active.

Risques et contre-indications

  • Risques : saignement, douleur post-acte, cicatrisation retardée

  • Contre-indications relatives : zones irradiées, mal vascularisées, patients sous AOD, extrémités (doigts, nez), zones proches d’un os ou matériel


👉 Une biopsie bien réalisée oriente la prise en charge et peut éviter des mois d’errance thérapeutique.

10 questions indispensables pour bien traiter une plaie du membre inférieur

Introduction

Les plaies des membres inférieurs peuvent avoir de multiples causes. Une mauvaise identification des facteurs sous-jacents peut entraîner un retard de cicatrisation ou des complications sévères.

Dans cet article, nous vous proposons 10 questions essentielles à poser lors de l’évaluation d’une plaie, afin d’assurer une prise en charge optimale et personnalisée.

1. Y a-t-il une artériopathie des membres inférieurs ?

L’artériopathie est une cause majeure de retard de cicatrisation.
📌 Examen clinique :

  • Palpation des pouls périphériques
  • Recherche de signes cliniques secondaires
  • Mesure des IPS et IPSO
  • Écho-doppler artériel

2. Y a-t-il une hyperpression veineuse ?

Deux origines possibles :
Hyperpression veineuse centrale : insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique sévère
Hyperpression veineuse périphérique :

  • Insuffisance veineuse superficielle (varices)
  • Insuffisance veineuse profonde (syndrome post-phlébite)
  • Insuffisance veino-lymphatique (troubles de la marche, raideur ou ankylose de cheville, obésité, chirurgie des MI récente…)

3. Y a-t-il une infection ?

L’infection peut être locale, loco-régionale ou générale.

Il est essentiel d’évaluer également les signes d’infection ostéo-articulaire associée.

4. Y a-t-il un problème d’appui ?

Certains troubles neurologiques favorisent l’apparition de plaies chroniques, notamment :

  • Neuropathie diabétique périphérique
  • Autres troubles neurologiques affectant la marche

5. Y a-t-il un problème de nutrition ?

Un état nutritionnel dégradé ralentit la cicatrisation.
🔎 Vérifications :

  • Évaluation par le Mini Nutritional Assessment (MNA)
  • Recherche de carences vitaminiques (notamment vitamine C)

6. Y a-t-il des comorbidités associées ?

Certaines pathologies aggravent les plaies :

  • Obésité, diabète
  • Dialyse (risque de calciphylaxie)
  • Cancer sous traitement (vascularite, infection, métastases ulcérées)
  • Maladies auto-immunes et inflammatoires (vascularite, pyoderma gangrenosum)
  • Médicaments provoquant des ulcères : Hydrea, Nicorandil, Methotrexate, etc…
  • Médicaments influençant la cicatrisation (immunosuppresseurs, immunomodulateurs corticoïdes, AINS prolongés)

7. Y a-t-il un aspect atypique ?

Une plaie non conventionnelle doit faire suspecter :

  • atypie de la plaie : ulcère tumoral, angiodermite nécrotique, pyoderma gangrenosum
  • granulome inflammatoire après désunion chirurgicale : infection post-chirurgicale ou réaction à un corps étranger (fils)
  • Anomalies de la peau périlésionnelle : bulles, pustules, purpura, livédo, nécroses multiples, micro-abcès, nodule (tumeur). 

8. Y a-t-il des facteurs sociaux ?

L’environnement du patient impacte la prise en charge :
🏚️ Logement insalubre, précarité
😞 Isolement, dépression

9. Y a-t-il un contexte particulier de survenue ?

🦟 Retour de pays tropicaux : suspicion de parasites ou de germes atypiques
🩸 Peau noire : risque accru de drépanocytose

10. Y a-t-il une origine traumatique ?

  • Déchirure cutanée,
  • hématome disséquant
  • Morsures, piqûres d’insectes
  • traumatisme minime avec lésion extensive : angiodermite nécrotique, pyoderma gangrenosum

Conclusion

L’évaluation rigoureuse d’une plaie du membre inférieur repose sur un questionnement structuré et une analyse approfondie. Ces 10 questions essentielles permettent d’optimiser la prise en charge et d’accélérer la cicatrisation.

💡 Vous avez trouvé cet article utile ? Partagez-le avec vos collègues